Interventions on Well-being, Occupational Health, and Aging of Healthcare Workers
Fadel, M., Roquelaure, Y. & Descatha, A. (2023). Interventions on Well-being, Occupational Health, and Aging of Healthcare Workers: A Scoping Review of Systematic Reviews. Safety and Health at Work. 14(1):135-140.
Our opinion
Un article d’une équipe française de l’Université médicale d’Angers sur l’évolution de la prise en compte des risques au travail, dans une approche de plus en plus large, qui questionne les moyens à mettre en place pour être efficace.
Une bonne synthèse du problème.
Notre synthèse
Ces auteurs français de l’Université d’Angers proposent une méta-analyse internationale sur les risques de santé au travail, qui vont maintenant des risques les plus traditionnels de toxicité et d’expositions dangereuses de toutes sortes jusqu’aux multiples aspects ajoutés au fil du temps en rapport avec la protection de la santé mentale des travailleurs : satisfaction et qualité de vie au travail, respect de l’égalité des genres, reconnaissance et qualité des rapports humains, sans oublier la littérature montante sur le maintien en bonnes conditions/protection des travailleurs vieillissants.
L’analyse est partie de la sélection et lecture de 542 articles pour retenir finalement pour la rédaction de ce travail 13 articles qui étaient déjà des revues de littérature et/ou déjà des méta-analyses sur le sujet.
La plupart de ces revues de littérature sont très récentes, notamment pour 6 d’entre elles publiées il y a moins de 3 ans, avec un accroissement très important des publications sur le sujet de la santé mentale depuis 2 ans (effet Covid).
Le nombre moyen d’études incluses dans chaque revue va de quelques-unes à 55, avec une importante variation sur le nombre et le type de travailleurs inclus. Les infirmier(e)s sont les cibles les plus fréquentes des interventions proposées, le plus souvent comme victimes (des mauvaises conditions de travail), parfois comme cible pour améliorer les mauvaises conditions observées chez d’autres travailleurs.
Les interventions vont d’actions de formations classiques jusqu’à des programmes de e-learning, des programmes de relaxation, des programmes comportementaux et même des programmes faisant appel à des animaux comme artefact et substitut affectif. La qualité méthodologique est tout aussi très inégale, laissant hélas souvent à désirer sur les points les plus importants, avec par exemple le paradoxe d’un niveau de preuve de résultats très faible sur les effets sur la santé mentale, pourtant centraux dans la satisfaction au travail, contrastant avec des niveaux de preuves très élevés sur des effets physiologiques ponctuels (port de gants en latex par exemple).
L’étude montre que les interventions sur la santé au travail représentent aujourd’hui un spectre tout à fait considérable, tant le domaine concerné est grand, allant du risque toxique ou physique jusqu’à toutes les formes de risques psychologiques.
Ce sont clairement ces impacts sur la santé mentale qui constituent le cœur des nouveautés. La Covid a été une opportunité de demande et de motivation pour la recherche, très productif pour avancer sur l’identification et la prévention de tous ces impacts sur la santé mentale. Mais en même temps, la plupart de ces avancées n’ont été réalisées que dans le milieu médical, où la souffrance du corps infirmier était très grande et la demande très forte.
Les revues de questions récentes l’attestent, avec des interventions le plus souvent mixtes, individuelles et organisationnelles, incluant le développement de compétences, la gestion du stress, l’amélioration du travail d’équipe (team building), l’amélioration de la communication, la (réduction de la) charge de travail, et la gestion des horaires et du temps de travail. La santé est un exemple caricatural d’amplitude horaire trop longue et de programmation erratique du planning.
Ces interventions dans le secteur de la santé essaient progressivement de s’inscrire dans une approche globale du risque au travail, allant de formations plus traditionnelles à l’usage des seringues et au risque de piqûre contaminante non intentionnelle, jusqu’à toutes les approches sur la santé mentale citées précédemment.
Cette méta-analyse montre aussi les manques dans ces approches.
Le premier manque est celui de la trop faible généralisation des avancées à tous les secteurs industriels. Comme dit précédemment, la très grande partie des travaux récents a été conduite presque exclusivement dans le secteur médical, et encore en se limitant au secteur professionnel. Même dans ce milieu médical, la grande famille des aidants hors de l’hôpital (communautés d’aides sociales, professionnels hors hôpital) est restée en dehors des cibles d’intervention.
La généralisation multi-industrie, multi-professionnel et assimilé est encore un pas de plus à faire, à la fois pour en tirer des lois plus solides et plus applicables à tous, notamment à des risques et des expositions autres que ceux du secteur médical, et aussi parce qu’elle questionne les forces disponibles de recherche et d’action sur ce secteur (notamment la médecine du travail, souvent en asphyxie de postes).
Le besoin d’une approche globale de la santé au travail est encore plus grand que la tendance actuelle constatée. Le périmètre à inclure devrait traiter de tous les risques (psycho-sociaux, physiques, biologiques et chimiques) sans oublier les risques associés à l’hygiène de vie (sommeil, nutrition, addiction) en ajoutant les spécificités individuelles essentielles (particulièrement l’exposition des femmes). Enfin, par l’effet cumulatif de la plupart des nuisances, il est essentiel d’avoir des études longues sur les nuisances et les interventions, étalées sur plusieurs années ; des études suivant ce type de protocole manquent encore cruellement.